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Dans les coulisses du Registre canadien sur la fibrose kystique, avec Stephanie Cheng

SEPTEMBER 6, 2022

L’une des bases de données sur les personnes atteintes de fibrose kystique (FK) les plus complètes au monde, le Registre canadien sur la fibrose kystique, contient des données vitales qui peuvent être utilisées pour découvrir et surveiller des tendances en matière de santé, comprendre les schémas de la maladie et les soins des patients, faire la lumière sur les nouveaux défis et déterminer l’avenir de la maladie.

Mais que nous dit exactement cette ressource qui existe depuis 40 ans, au sujet des Canadiens qui vivent avec la fibrose kystique? Et comment cette information est-elle utilisée?

Stephanie Cheng, directrice du Registre canadien sur la fibrose kystique, nous donne un aperçu de ce que recèle le Registre sur la FK et de sa portée tant à l’échelle nationale qu’internationale.


Qu’est-ce que le Registre canadien sur la FK?

Le Registre canadien sur la fibrose kystique est une base nationale de données sur les personnes atteintes de fibrose kystique qui vivent au Canada. Toute personne reçue dans une clinique de FK au Canada peut choisir de participer au Registre. Les données sont versées dans une plateforme en ligne sécuritaire par les cliniques de FK, et la base de données est gérée par Fibrose kystique Canada. Le Registre canadien sur la FK existe depuis des décennies (début des années 1970). C’est l’un des registres sur la FK les plus anciens et les plus exhaustifs au monde. Les données saisies portent sur les paramètres cliniques, les traitements, les hospitalisations, les infections respiratoires, le génotype et les transplantations.

Comment le Registre évolue-t-il avec le temps?

Lorsqu’une personne reçoit un diagnostic de fibrose kystique, ce qui survient de nos jours généralement à la naissance ou pendant l’enfance, sa clinique de FK lui demande si elle souhaite faire partie du Registre canadien sur la fibrose kystique. Si la famille ou la personne accepte, un formulaire de consentement est signé. La participation au Registre sur la FK est volontaire et n’affecte pas les soins reçus.

Du point de vue de sa base de données, le Registre sur la FK a pris plusieurs formes depuis ses débuts, pour finir par évoluer à sa forme actuelle en 2015.

À quoi servent les données du Registre sur la FK?

Nous recevons en moyenne 60 à 70 demandes de données par an, les types de demandes ayant tendance à changer avec le temps.

À l’apogée des approbations concernant Trikafta en 2021, la plupart de nos demandes provenaient du personnel de Fibrose kystique Canada, notamment des équipes de la défense des droits, des communications et des activités de financement, qui cherchaient des données récapitulatives sur l’admissibilité à Trikafta.

Nous recevons également des demandes des cliniques de FK elles-mêmes. L’équipe du Registre peut par exemple aider les cliniques à déterminer qui, parmi leurs patients, est admissible à des essais cliniques particuliers. Autre exemple, après l’approbation de Trikafta par Santé Canada, le Registre a permis d’établir qui était admissible au médicament.

Les chercheurs qui souhaitent utiliser les données du Registre doivent suivre un processus de demande rigoureux. En général, les chercheurs ont besoin de données de nature individuelle pour leurs études, donc des données très détaillées. Pour obtenir ce type de données, ils doivent remplir un formulaire de demande décrivant leur projet, l’utilisation précise qui sera faite des données, et l’importance de l’étude pour la communauté élargie. Avant la divulgation de toute donnée anonymisée, tous les projets doivent être approuvés par un comité d’éthique de la recherche et évalués à l’interne par notre conseil d’experts en recherche sur la FK.

Chaque année, les données du Registre canadien sur la fibrose kystique sont résumées dans notre Rapport de données annuel.

Quels faits intéressants au sujet du Registre sur la FK ne sont pas connus de tous?

Peu de personnes savent que le Registre canadien sur la FK regroupe presque TOUTES LES PERSONNES qui vivent avec la FK au Canada, un fait rarissime dans le monde des maladies chroniques. Certaines maladies chroniques affectent une population beaucoup plus grande au pays, mais n’ont pas forcément de cliniques spécialisées dans leurs soins. Le fait qu’il existe des cliniques de FK spécialisées partout au Canada et que les données de ces cliniques soient recueillies nous donne un portrait beaucoup plus précis de la manière dont de nombreux Canadiens vivent avec la maladie.

Autre fait rare, nous disposons de décennies d’informations remontant aux années 1970, alors que la plupart des registres voués à la FK ailleurs dans le monde n’ont pas de tels renseignements historiques. Nos données sont aussi assez détaillées, surtout depuis 2015, alors que nous avons commencé à saisir des données portant sur presque toutes les visites aux cliniques de FK, entre autres concernant la taille, le poids, la fonction pulmonaire, les infections respiratoires et les hospitalisations. En plus d’être important pour permettre à l’équipe de soins d’évaluer la trajectoire de santé d’un patient, ce degré de précision est crucial pour réaliser des études sur la FK.

Comment le Registre canadien sur la fibrose kystique travaille-t-il avec les autres registres internationaux voués à la FK?

Nous avons la chance d’avoir au Canada des cliniques de FK spécialisées qui sont la pierre angulaire du Registre sur la FK. En fait, plusieurs pays qui ont un modèle de soins semblable au nôtre ont aussi leur propre registre consacré à la fibrose kystique, y compris les États-Unis, l’Australie, la Nouvelle-Zélande et l’Afrique du Sud. La plupart des pays d’Europe participent au European CF Society Patient Registry, soit par leur propre registre national ou par les cliniques de FK ou les hôpitaux. Nous formons un groupe uni et nous collaborons quand nous en avons l’occasion.

Pour montrer nos liens étroits, prenons l’exemple de la pandémie de COVID-19. Un groupe de registres nationaux sur la FK s’est réuni pour la première fois concernant la COVID-19 à la mi-mars 2020 (peu de temps après l’annonce d’une pandémie mondiale). Nous savions que cette infection respiratoire émergente pourrait être particulièrement inquiétante pour la communauté fibro-kystique et ensemble, nous nous sommes demandé comment mieux surveiller la situation. Nous avons d’abord et avant tout compris l’importance de saisir des renseignements normalisés à jour. La plupart des registres sur la FK (dont le nôtre) recueillent déjà des données sur les infections (.r ex. Pseudomonas aeruginosa) et les hospitalisations (p. ex. pour les exacerbations pulmonaires), nous avons pu modifier certains champs de nos registres pour capter des renseignements sur les infections causées par le virus de la COVID-19 et leurs conséquences. Ensemble, nous avons publié un certain nombre d’articles universitaires et présenté des rapports sur le risque de l’hospitalisation et de la maladie grave chez les personnes fibro-kystiques qui contractent la COVID-19. Notre étude la plus récente se penchera sur les résultats cliniques à moyen et à long terme après une infection par le coronavirus.

En plus de collaborer aux études, nous offrons des ressources et aidons les pays qui n’ont pas de registre à en mettre un sur pied. Ce travail comprend la normalisation des définitions et l’identification d’un ensemble de données minimal à inclure dans tout registre sur la FK.

Quels renseignements auraient pu rester inconnus sans le Registre sur la FK?

Le Registre canadien sur la FK s’est avéré extrêmement utile pour notre travail de défense des droits. Sans le Registre, nous n’aurions pas pu déterminer combien de personnes sont porteuses de la mutation delta F508 au Canada, autrement dit combien de personnes seraient admissibles à Trikafta. Grâce au Registre, nous avons pu obtenir rapidement des données exactes à ce sujet.

En fait, lorsque l’Agence canadienne des médicaments et technologies de la santé (ACMTS) a recommandé que l’accès à Trikafta soit limité aux personnes dont la fonction pulmonaire est inférieure à 90 %, nous avons pu, parce que nous recueillons des données sur ce type de paramètre, dire à chaque province exactement combien de personnes ne pourraient pas être admissibles si ce critère était adopté.

Qu’est-ce que l’avenir réserve au Registre canadien sur la FK?

L’avenir s’annonce brillant! Pour le moment, le Registre est un répertoire de données factuelles fournies par les cliniques de FK; nous aimerions cependant y ajouter des expériences vécues. Un projet pilote appelé Portail des patients du Registre canadien sur la FK permet aux personnes de consulter leurs propres données dans le Registre. Nous souhaitons voir ce portail élargi pour permettre plus que la simple consultation des données de visites trimestrielles à la clinique, et faire en sorte qu’une personne puisse ajouter des données au portail des patients. À titre d’exemple, les gens peuvent maintenant mesurer leur fonction pulmonaire à domicile avec des spiromètres portatifs, mais où vont ces données? Il serait utile qu’elles puissent être ajoutées au Registre sur la FK par la personne elle-même, quand elle le veut, de manière à pouvoir être partagées avec les cliniques.

Dans l’ensemble, le Registre canadien sur la FK est une ressource et un outil de recherche clinique bien établi, mais les perspectives sont sans limite! Je crois qu’il existe encore un grand potentiel insoupçonné et que nous pourrons continuer à progresser en travaillant avec la communauté pour mieux comprendre comment le Registre peut être encore plus utile pour les personnes qui vivent avec la fibrose kystique.

Appuyez le Registre canadien sur la FK aujourd’hui et aidez-nous à aller toujours plus loin.